Le noble chemin octuple.

Prise de conscience des gens.

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La conscience que nous avons des gens n'est habituellement pas une conscience d'eux en tant qu'êtres humains mais en tant que choses ou objets « situés au-dehors». En d'autres termes, nous sommes conscients d'eux en tant que corps physiques affectant notre corps physique. Cette façon d'être conscient des autres n'est pas suffisante. Nous devons prendre conscience d'eux en tant que personnes.

Comment faire cela ? Comment prendre conscience d'une autre personne en tant que personne ? Tout d'abord, bien entendu, nous devons la regarder. Cela semble simple, mais c'est en fait très difficile. Quand je dis « la regarder », je ne veux pas dire la regarder dans le blanc des yeux. Nous ne devons pas la fixer d'un regard hypnotique. Nous devons simplement regarder - et cela n'est pas aussi facile qu'il y paraît. Ce ne serait pas vraiment exagérer que de dire qu'il y des gens qui n'ont jamais réellement regardé d'autres personnes, tandis que d'autres n'ont jamais réellement été regardés. Il est en fait possible de traverser toute sa vie sans jamais regarder quelqu'un d'autre ni être à son tour regardé ; et si nous ne regardons pas les autres nous ne pouvons pas prendre conscience d'eux.

Une des activités que nous pratiquons parfois avec les Amis de l'Ordre Bouddhiste Occidental est un ensemble d'exercices de communication. Il y en a quatre. Le premier consiste à « simplement regarder », c'est-à-dire à s'asseoir et à regarder - sans tension ni embarras, et sans éclater en un rire hystérique - la personne en face de vous, qui elle-même vous regarde. Cet exercice est le premier car il ne peut y avoir de véritable communication, de véritable échange avec une autre personne, sans que l'on prenne conscience de cette personne. La communication, bien sûr, est un sujet en soi. Je l'ai abordée en liaison avec la Parole Parfaite, et tout ce que je dois répéter ici c'est que la communication n'est pas du tout limitée à la parole. Elle peut être aussi tellement directe et subtile qu'elle en est virtuellement télépathique. Quand la communication est de ce type, cela indique généralement chez les gens un très haut niveau de prise de conscience. De plus, une telle prise de conscience « télépathique » est habituellement réciproque.

En Inde il y a une forme importante de prise de conscience des autres qui est connue sous le nom de darsan. Littéralement, ceci signifie un regard ou une vue - une vision - et c'est le terme utilisé pour la prise de conscience du maître spirituel. En Inde les maîtres spirituels ont souvent ce qui s'appelle des ashrams, qui sont des sortes de centres de retraite où le maître vit, où ses disciples se rassemblent autour de lui, et où les gens viennent le voir. Habituellement, dans de tels ashrams, le soir, après un service appelé arati pendant lequel on promène des lumières devant l'image de la déité hindoue qui est vénérée, le maître s'assied simplement et les gens viennent. Dans le cas des maîtres les plus célèbres les gens viennent de toute l'Inde. Ils ne viennent pas seulement par centaines mais par dizaines de milliers, et tout ce qu'ils font est s'asseoir et regarder le maître. Ils « prennent son darsan ». En d'autres termes ils font de leur mieux pour prendre conscience de lui - prendre conscience de lui en tant que personne spirituelle, ou en tant qu'incarnation vivante d'un idéal spirituel.

Le célèbre Ramana Maharshi, que j'ai mentionné lors de ma discussion au sujet de la Parole Parfaite, restait assis « donnant son darsan » dans son ashram pendant des semaines et des mois. Je crois qu'il est resté assis au même endroit pendant environ cinquante ans et, comme je l'ai vu moi-même, les gens venaient de toute l'Inde pour le voir, pour le regarder, pour prendre conscience de lui. Très souvent, ils ne posaient pas de questions, ni ne commençaient aucune discussion. Bien sûr certains le faisaient, mais la majorité ne faisaient que s'asseoir, regarder, et prendre conscience. Ils « prenaient le darsan ». Selon la tradition spirituelle indienne il ne suffit pas d'apprendre en écoutant l'instruction du maître. On doit prendre conscience de lui en tant que personne spirituelle. Sans cette forme de prise de conscience très peu peut être obtenu du maître : on peut avancer intellectuellement, mais on n'avance pas spirituellement.

'Vision and Transformation' © Sangharakshita, Windhorse Publications 1990, traduction © Christian Richard 2003.

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  1. Vision parfaite.
  2. Emotion parfaite.
  3. Parole parfaite.
  4. Action parfaite.
  5. Moyens d'existence parfaits.
  6. Effort parfait.
  7. Prise de conscience parfaite.
  8. Samadhi parfaite.